samedi 15 décembre 2007

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Hourra ! hourra ! La bite, la bite, l’anguipède il m’aime, il m’aime, à quatre pattes il m’aime, sa petite tête obstinée il me la veut mettre, dedans le trou de devant, le trou de derrière, dedans, dedans, dedans.

Manger, manger, manger ! À chaque repli, à chaque rebond, à chaque recoin, une petite mâchoire et une petite larve, un petit doigt goulu qui monnaye ses services.

Je m’aime, je m’aime, je m’aime, à quatre pattes je m’aime, amplificateur d’horizon, amplificateur, résonateur, médiateur de grands possibles, paradigme d’antennes et d’antennes et justifiant ma matière.

La fourche qui contrempale, j’en fait mon attribut, la terre n’est pas ma mère, pour être fondamentale, je n’en suis pas plus conne, pour être bien baisée, je n’en suis pas salope, pour être bien lubrifiée, j’ai mes petites habitudes.

Faisant de grands pas sur le pavement craquant-claquant sous le talon, faisant de grands pas, m’enfle de l’univers en son empire volatil, suis osmotique et peu dense, condensateur de regards et de pollutions, faisant de grands pas, dispense le clair-obscur, de ma paupière épaisse au ras des pavés.

Que l’on m’oigne les intérieurs des combles à la crypte, afin de me renaître, que je n’expulse jamais ces moi surnuméraires qui m’échappent quand m’échappe, ce qui fait que m’échappe.

Me compte les vides, comme aiguille bipolaire, comme aiguille chattée et le chas enfilé prête à coudre la nappe d’une peau encore fraîche de ses propres boyaux, le tout arraché au vif hurlant d’un porteur de bite :

J’en prends un, et mes mains dépassent.
J’en prends deux, et mon monokini tient sans ficelle.
J’en prends trois, et circumnavigue et encore.
J’en prends mille et mille, Elsabet, pour mon bain de semence.
J’en prends pour mon contentement, pour moi et toutes mes sœurs et toutes mes sœurs en moi en prennent, prennent, sont prises, car la bite me pousse, pourquoi pas, j’en ai la matrice pour la duplication, et mes sœurs ne sont pas si pimbêches, et je les peux bien foutre, sinon qu’on me saigne, ou alors, antéprimordiale, indifférenciée, c’est sur mon propre autel que l’on m’immole.

C’est ainsi que de l’index et du majeur me sonde et sonde l’abysse du monde, et de l’autre index et de l’autre majeur rencontre l’autre monde, qui n’est pas l’antimonde, ou qui l’est si l’explosion synergique est néant, nirvana.

En prolongement de la main le doux rostre de verre.

Local mais portant la gangrène, sur vingt centimètres, et vingt centimètres, et vingt centimètres encore, et encore, vingt centimètres encore, et encore et encore, de mes cris déchire les voiles de toutes ces connes de vierges, de leurs pères, de leurs mères, de leurs frères, de leurs prêtres…

Et tu honoreras ceux qui te pissent dessus.
Et tu honoreras les jaloux, les aigris, les exciseurs, les dieux uniques, les impurateurs, les équilibristes d’un cosmos assez mesquin pour suivre l’humain.
Et tu honoreras ton père, ta mère, tes frères, tous ceux qui sont juste assez loin, juste assez près pour que commence la lapidation !
Que la lapidation commence !

Jetez-moi vos bites de pierres, votre gravier fécondant, tas de connards, tas de pédés sans couilles ! Les mange, les absorbe, les engloutis, me les incorpore, les ingère et les digère et en construis ma muraille, la plus grosse massue qui éclatera jamais vos petits trous du cul qui n’espéraient pas tant de bonheur !

Vos petits culs de mecs.

Parce qu’oncques n’y aura de mâle tige assez grosse pour mon cul, les assez grosses sont molles, elles pompent, elles pompent, mais elles sont molles, elles pompent, elles pompent, les mignons aussi les regardent mais elles sont molles, elles pompent, elles pompent et quand j’étais petite, on nous racontait des histoires merveilleuses où les princes ne débandent pas, ne débandent jamais, où des bites magiques volent au secours des princesses, où des hordes de nains et de trolls bien membrés assouvissent tous les désirs des pauvres bergères, où les lits sont immenses et le temps est immense et le désir est immense et le plaisir est immense et la bite du Chevalier Noir.

Mais, mais, mais, mais.

Mais, mais, mais, mais quand j’ai saigné on m’a mis un pansement, et un ruban rose dans les vipères, et c’était des cheveux, puis il a fallu recoudre, et dans le pot, caca.

Toutes alignées, étions toutes alignées, toutes alignées et même pas ligotées, juste la honte du petit nœud rose pour nous tenir cul à la muraille, la poitrine creusée pour que pas un sein ne dépasse avant d’y suspendre la trayeuse, et pas d’érection de clitoris sinon clic-clic les pisseuses !

Même pas enchaînées par des gros violeurs poilus, sales et puants, même pas, même pas suspendues par des lanières de cuir à des crocs de bouchers et tripotées par des petits japonais bavants et boutonneux, même pas, même pas photographiées dans le nouveau catalogue Bondage & Soumission avec un bâton de dynamite dans l’oignon, même pas…

Y avait ma grand-mère et sa fille ma mère, et mon arrière-grand-mère et ses fille et petite-fille ma grand-mère et ma mère, et mon arrière-arrière-grand-mère et ses arrière-petite-fille, petite-fille et fille mon arrière-grand-mère, ma grand-mère et ma mère, et plein de vieilles vieilles, moches et vieilles et portant des paquets sur la tête, des outres, des caisses et des squelettes d’enfants dans des chiffons entortillés autour de leur corps moisis.

Elles n’avaient plus de dents, ou en avaient encore.

Le sol était dallé d’yeux qui craquent-claquent sous le talon pour nous retenir prisonnières, mais Lala a dit : « J’ai pas suivi, qu’est-ce qui nous retient prisonnières ? » et j’ai enlevé ma petite culotte blanche et elle a enlevé sa petite culotte blanche et d’autres ont enlevé leurs petites culottes blanches et la terre nous a bombardées de sa masse, sommes parties en faisant des grands pas.

En chantant : « C’est nous les ventouses, touze, touze
On va en partouze, touze, touze
Où y a pas d’tantouzes, touze, touze
Et nous faisons des grands pas ! »

Le vent nous faisait frétiller les poils de chatte.

Ne regardant pas en arrière, n’avons pas vu ma grand-mère et sa fille ma mère, et mon arrière-grand-mère et ses fille et petite-fille ma grand-mère et ma mère, et mon arrière-arrière-grand-mère et ses arrière-petite-fille, petite-fille et fille mon arrière-grand-mère, ma grand-mère et ma mère, et toutes les autres vieilles vieilles, moches et vieilles qui puent et bavent, donc impossible de raconter ici comment elles ont vu nos culs se trémousser alors que nous faisions de grands pas.

Lala avait ramassé de ces yeux qui craquaient-claquaient sous le talon et voulait s’en foutre dans le vagin mais je lui ai dit que ça faisait Georges Bataille et que c’était fondamentalement ridicule, alors les a enfilés sur un long cheveu d’or, ça faisait Jack Vance, mais tant qu’à faire d’avoir des références, autant qu’elles soient triviales.

À un moment, avons croisé Dieu qui faisait des pas, ma foi assez grands, et qui chantait :
« Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce ma bite salope,
Salope, salope, salope ! »

Et c’était comme s’il y avait des centaines de gars qui marchaient au pas, chantant :
« Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce ma bite salope,
Salope, salope, salope ! »

Et c’était chose bien singulière d’entendre tel chant et de ne pouvoir, ne pouvoir vraiment, vraiment ne pouvoir et de ne savoir ni être sûre de vraiment vraiment, et dans une telle expectative…
« Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce, suce, suce ma bite,
Suce ma bite salope,
Suce ma bite salope,
Salope, salope, salope ! »

… était-ce bien ou mal, bon ou mauvais, humiliant ou glorifiant, séduisant ou répugnant, aigu ou obtus, concave ou convexe, pénétrant ou pénétré, moi ou l’enfer ?

Et aussi était-ce bien ou mal, bon ou mauvais, émollient ou horrifiant, réducteur ou écorchant de ne pas, ne pas pouvoir, vraiment ne pas savoir et de danser l’expectative comme une mer d’yeux qui en profitent pour s’immiscer partout, jusque dans mes orbites.

Devais-je sucer ces bites ?

Ma stridulance attachée, elle attachée aux deux bouts quand, quand à quatre pattes je m’aime, quand, quand m’essore et saute sautille poussant de petits cris, poussant des rochers sphériques enduits d’encre noire sur le papier du territoire, montagne dessine.

Ma stridulance équipée d’extensions corporelles et temporelles me laisse sur le cul, à me tortiller pour que quelque chose y rentre, quelque chose avant l’os pénien de Madame-Monsieur Mort, l’Adam définitif, qui fait sourire fixement ces immondes vieilles qui le regardaient, mon cul, comme faisais de grands pas.

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